04 - Une sortie pas si tranquille...

Messages : 573 Date d'inscription : 16/08/2011

Sa dernière cigarette... Il venait de jeter le mégot, qu'il regardait se consumer, doucement, sous la puissance rayonnante de l'astre destructeur. Assis bien à l'ombre d'une pierre, Connor se sentait protégé, préservé, de ce soleil qui avait tué tant de gens par tant de moyens différents.
Les autres membres de sa milice étaient morts, ou partis, il ne restait plus que lui. Ils avaient bien bourlingué ensemble, ils s'étaient bien marrés quand la plupart crevaient de peur. Mais maintenant, tout était fini. Il ne restait plus qu'à attendre.

L'ex-soldat dirigea son regard vers la porte bien fermée du complexe qu'il avait trouvé. Il avait essayé d'y pénétrer, en vain. L'homme avait utilisé son couteau, avait essayé de défoncer la porte et de nombreux stratagèmes encore. En vain. Rien n'y avait fait.

Et comme le crâne rasé ne savait pas où aller, qu'il n'avait plus de vivres non plus, il avait décidé que cet endroit serait aussi bien qu'un autre pour terminer ses cigarettes et se laisser porter par la douceur évacuatrice du vent... Il emporterait sa vie, peut-être, pendant son sommeil, avec un peu de chance.

* BRRRRrrrrrr *

Le bruit était si fort que le militaire se redressa soudain et délaissa ses pensées macabres. Il se souvenait à présent de l'autre raison qui l'avait fait demeurer ici : quelqu'un pouvait peut-être sortir de cet endroit, ouvrir le passage à Connor, voire lui servir un peu plus.
Et la porte venait de s'ouvrir.

Alors, le chasseur se redressa, et leva un peu la tête de derrière le rocher où il était dissimulé. Tiens donc, une scientifique... Tâchée de sang en plus. Connor nota le détail mais n'y réfléchit pas trop. Comme beaucoup d'être humains, il avait vu et commis des choses telles qu'à présent, il en faudrait beaucoup pour l'étonner.

La jeune femme avança alors. Les yeux du crâne rasé s'étrécirent tandis qu'il la détaillait. La garce n'avait pas l'air mal, même si c'était dur à voir, le soleil éblouissait, et elle était couverte de sang.
Son lasso de barbelés dans une main, le militaire ajusta le bandana aux couleurs des Etats-Unis sur son crâne et suivit la jeune femme des yeux, avant d'avancer à sa suite. Il se trouvait sur une hauteur pierreuse de deux mètres par rapport à l'endroit où elle marchait, et restait dissimulé derrière les rochers. Il allait la laisser prendre un peu d'avance, cela lui permettrait de vérifier également que personne ne la suivait...

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Plus rien… Plus rien pour l’empêcher de passer, pour sortir, enfin. Le dernier générateur avait rendu l’âme, n’amenant plus de jus dans les serrures magnétiques. Elle venait de terminer son dernier repas. Ventre plein, tout allait bien. Le monde tel qu’elle l’avait vu durant ses leçons allait lui livrer tous ses secrets. Pour sa sortie, elle reprit le dernier pantalon qu’on lui avait fourni, quelques années plus tôt. Ses hanches s’y trouvaient à l’étroit et ses chevilles étaient à l’air, mais elle ne voulait pas dépouiller les cadavres plus si frais qui hantaient l’habitacle.

Elle dégota une blouse qui avait subi quelques éclaboussures de sa dernière chasse, une paire de rangers à sa taille… et même, miracle, des chaussettes ! Avec pour tout équipement… ses mains, elle tira la porte vers elle après avoir ôté les dernières cales qui la maintenaient fermement. Tout d’abord, elle ne vit rien. Rien que de la lumière qui lui brûlait la rétine, comme au premier instant de sa vie. Comme ce jour là, elle porta son pouce plein de sang à sa bouche, et téta. Une nouvelle vie débutait. La vie dans le monde.

Une légère odeur d’herbes brûlées lui picota les narines, elle ne s’en inquiéta pas. Elle voulait voir… Elle s’attendait à être assaillie de senteurs fortes et originales, mais la fumée mise à part, elle ne décelait rien. Le fumet cuivré qui tâchait ses mains et son visage était trop fort. Les sons… Pas d’oiseaux comme il était censé y en avoir… Rien que le silence.

Enfin, elle vit, et ce qu’elle vit la choqua. On lui avait montré des forêts, de la verdure, des arbres, des champs, des villes… À part quelques rochers, des crevasses dans le sol, diverses irrégularités, Nouanda ne voyait rien. Rien de vivant en tous cas. Elle était dépitée, le monde se révélait décevant.

La Brune avança, dans tous les cas, l’abri était inutilisable et elle ne comptait pas y retourner, pas tout de suite en tous cas. Un roulement de pierre, à peine perceptible, la fit se figer au bout d’un temps. Elle écouta le silence, sans bouger. Rien. Rien d’autre que sa propre respiration.

Alors elle s’accroupit pour tester la texture du sol, fit glisser du sable et de petits cailloux entre ses doigts, attribuant à chacun le mot qui lui correspondait.

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Merde... Elle a failli te repérer, sois plus discret ! Et surtout, il lui fallait agir vite. La jeune femme ne semblait pas habituée à la vie en extérieure, c'est du moins ce que son corps et ses gestes trahissaient. Il fallait que Connor en profitât, vite. Et cette fois, aucun caillou ne devait dévaler la pente pour venir lui signifier qu'elle n'était pas seule...

Seule. Oui, elle semblait bien l'être. Personne d'autre n'était sorti après elle. Et quand il tendait l'oreille, il n'entendait rien ni personne, aucun son, en provenance de l'intérieur de l'abri. C'était trop beau pour être vrai... Non seulement il allait pouvoir dormir un peu au frais, mais en plus il trouverait peut-être quelques rations, de l'équipement ! Ses pensées commençaient à s'embrouiller sous le poids de l'optimisme qui dansait dans sa tête.
Il avait besoin de se calmer, de faire le point, de se concentrer.

Elle.

Il fallait d'abord se charger d'elle. Elle serait utile dans tous les cas : en brochettes, si c'était nécessaire. Il ne pouvait pas se permettre de la laisser partir tranquillement. L'homme est un loup pour l'homme non ? Connor ne savait plus qui avait dit ça. Sans doute quelque politicien d'avant la Fin.
Du loup, il adopta les pas. S'approchant lentement de sa cible, il ne jetait que de furtifs coups d'oeil par dessus la ligne rocheuse qui le cachait aux yeux de l'Asiatique. Heureusement, il avait la position du soleil pour lui : dans le dos. A croire que les plus hautes instances, là-haut, voulaient le voir réussir.

Un nouveau coup d'oeil. Là, c'était là, maintenant ! Il devait agir. La femme venait de s'accroupir, sans doute pour faire quelque prélèvement pour des tests quelconques. Mais enfin, elle ne les ferait jamais, ces tests... Connor allait y veiller.
Alors qu'elle avait le regard dirigé vers le sable et la poussière, le punk militaire se redressa vivement, et, après avoir fait virevolté le lasso dans sa main, le lança en direction de la jeune femme. Une prise, il allait faire une bonne prise...

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Son poing se crispa sur la deuxième poignée de sol. Elle n’était pas seule. Le duvet de sa nuque était hérissé, comme chaque soir ou presque lorsque l’un ou l’autre de ses précédents repas venait lui rendre visite. Une ombre se découpa sur le sol, pas bien grande, non, mais dépassant celle de la corniche qui la surplombait.

Sans réfléchir, elle se retourna, s’emmêla les pieds – la salle d’entrainement possédait un sol lisse, elle ! – à cause du sable et des cailloux et se retrouva sur le dos, le poing droit lancé devant elle ne sachant où était réellement sa cible.

Nada. Son poing brassa du vent. C’est alors que la morsure des barbelés s’entourant sur lui fit son apparition. Lâchant le sable – qui en profita pour lui revenir dans la gueule – elle saisit ce qui lui faisait mal et tira. Fort. Assez fort pour faire choir le pécheur. Si elle était ferrée, lui aussi. Pour peu qu’il tienne fermement son arme.

Les yeux brûlants, pas encore faits à la luminosité, irrités par le sable, brouillés par les larmes qui tentaient de les nettoyer, elle essayait d’apercevoir ce qui l’agressait. Ce, ou celui. Tandis qu’elle tirait, la douleur diminua sur son bras, laissant là une myriade de gouttes de sang. Sa main n’était plus que douleur, elle.

Le vent lui apprit une nouvelle douleur, celle de sa caresse sur les petites plaies, ce petit picotement insupportable. Elle préférait la douleur brute, telle celle de sa main dont le sang coulait déjà le long de son bras, se mêlant à celui de son dernier repas.

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Elle s'était retournée au moment fatidique, il n'avait semble t-il pas été assez prudent. S'il avait été moins affamé, moins déshydraté, sans doute n'eut-il pas commis pareille erreur de débutant. Mais le mal était fait...

Elle se redressa brusquement, dénotant une agilité que Connor n'avait pas pensé trouver chez une fille pareille, mais s'affala presque aussi sec, et un nuage de sable se leva au-dessus d'elle. Ensuite, tout se passa très vite. Le chasseur s'apprêtait à crier victoire et à ferrer la bête quand il fut soudain tiré brusquement en avant. Il n'eut que le temps de lâcher un hoquet courroucé d'étonnement, comme si ce n'était pas acceptable que les choses se déroulassent ainsi, puis fut précipité du haut de la paroi rocheuse.

Il tomba sur les genoux, et aussitôt, des cailloux lui percèrent la peau, allant fouailler la couche supérieure de ses chairs. Connor poussa un grognement douloureux, puis s'écroula sur le côté.
Le moment de choc passé, il jeta un vague coup d'oeil sur sa victime : elle n'était visiblement pas dans un meilleur état que le sien.

" Toi, toi... " souffla t-il avec colère. Il se trouvait presque à côté d'elle, et il tendit alors sa main pleine de sang - celle qui avait tenu le plus longtemps le lasso - sur le mollet de la jeune femme, et lui serra fort. Il s'en servit pour se redresser lentement, mais put à peine se mettre à genoux tant ces derniers lui faisaient mal.

Son visage couvert de poussière, son front légèrement ouvert, il faisait peine à voir. Mais il avait repris. La main droite se faufila à sa ceinture et en sortit un couteau. Il s'avança un peu plus vers la femme, à moitié à genoux, à moitié rampant :

" Tu... T'as vu ce que tu m'as fait ? Salope ! " lui hurla t-il au visage, avant de lâcher un mollard rempli de sang sur le côté.

Il commençait à bien la voir. Elle par contre, ne devait pas voir grand-chose. Ses yeux avaient sévèrement souffert, ainsi que ses mains - apparemment les victimes principales de son terrible lasso.
Malgré tout, on ne pouvait pas vraiment dire qu'il la maintenant complètement sous son joug. Il était assez faible lui aussi, et son couteau, s'il ne pouvait qu'inquiéter, n'était pas non plus assez près de la gorge de la femme pour constituer une menace immédiate. A croire que l'homme n'avait pas encore repris tous ses esprits.

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Elle lâcha l’arme qui lui mordait les chairs, les barbelés se détachèrent de sa peau avec un son bien connu, tels des dents s’arrachant à leur repas. Le sang coula plus fort, sans doute une veine avait été abimée. Mais elle, elle était en bonne forme, ses yeux mis à part.

Alors qu’il la maintenait par la jambe, la menaçant de son couteau, elle sourit. Oui, elle sourit. Elle sourit au terme de "salope", terme qu’elle connaissait pour l’avoir bien souvent entendu. Pourtant, d’après ce qu’elle savait, c’était réservé aux volontaires, ça… Mais à l’époque, avait-elle seulement dit non ? Bref, ce n’était pas le temps de la réflexion.

Sa jambe libre partit, frappant l’homme à genoux au ventre, à son ventre vide, et elle en profita pour se reculer et se mette accroupie. Prête à bondir. Elle n’était pas loin de lui, non, ses yeux le fixaient sans le voir, douloureux. Elle les ferma et se concentra sur les sons, le vent, le soleil… Les sons. Surtout les sons.

De sa gorge émana un grognement rauque, un feulement animal. L’odeur de l’inconnu était ancrée dans sa mémoire. L’odeur de son sang également, chacun a sa propre empreinte, sa propre saveur, et celle-ci lui disait bien des choses sur l’état de santé de son adversaire. En temps normal, il aurait constitué une menace, là… Le son mourut dans sa gorge, elle se mit à parler, voix rauque d’être restée si longtemps silencieuse.

- Que veux-tu ?

Les larmes ayant fait leur office, elle planta ses yeux sombres dans ceux de son interlocuteur.

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Le coup partit, sec, fort, et lui frappa l'estomac avec tant de vigueur qu'il fut propulsé en arrière, sur les fesses. Il se mit à tousser, essayant de happer un air qui ne voulait plus venir dans sa bouche et son nez. Sa main libre, celle qui ne tenait pas le couteau, vint agripper le ventre douloureux. Il avait le souffle coupé, et elle pouvait en profiter. Connor serra les dents, attendant le prochain coup... qui ne vint pas. Cela lui laissa le temps de reprendre un peu d'air, rechargeant ses poumons et prolongeant du même coup un peu son espérance de vie. Il avait été vulnérable, il l'était moins.

Lorsqu'il releva les yeux, elle était là, accroupie. Tel un félin, elle avait sorti les griffes, prête à bondir, prête à griffer. Il la regarda un peu mieux. Elle n'avait plus l'air d'une scientifique. Elle maîtrisait bien un certain art du combat, cela s'était senti dans son coup de pied et son rétablissement soudain. Et puis, tout ce sang, ce pantalon trop court. Bon sang, Connor, tu aurais pu être plus prudent...

Mais si ces plans devaient impérativement changer, rien non plus ne lui faisait perdre confiance en ses propres compétences. Il avait un couteau, il savait l'utiliser. Viens donc, garce, et tu souffriras autant que moi.
C'était ce que son regard empli de méfiance et de tension convoyait.

A présent accroupi lui aussi, s'étant redressé lentement, il abaissa légèrement son couteau, histoire de paraître moins agressif. Il haussa les épaules, et esquissa une grimace qui pouvait être interprétée comme un sourire amer et désabusé :

" Faut croire que je t'ai pris pour une gazelle... Mes yeux m'ont joué un tour... Après tout, les illusions dans le désert... "

Il émit un ricanement nerveux, puis indiqua l'entrée de l'abri derrière elle :

" T'as bien un peu de bouffe à l'intérieur non ? Et de la flotte ? Ici, y a plus grand-chose tu vois... " dit-il d'un ton d'évidence, ignorant bien entendu que son interlocutrice n'avait jamais vu l'extérieur.

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- Je vois.

Telle fut sa réponse tandis qu’elle se redressait. Il n’était plus une menace, en tous cas pas pour l’instant. C’était ce qu’elle percevait de sa posture. Elle n’avait pas pour optique d’attaquer, elle souhaitait simplement se défendre. Sa soif de sang était apaisée pour l’instant. Elle n’avait pas faim.

Levant sa main blessée à hauteur de son visage, elle lécha ce qui en coulait, paupières baissées, concentrée sur la saveur qui emplissait sa bouche, elle pansa de la langue ses petites plaies. Dans ses yeux, lorsqu’elle les rouvrit, il pouvait lire comme… de la gourmandise.

Elle posa ensuite ses billes sombres sur la lame, certes baissée, mais encore sortie qu’il avait à la main. Nouanda tendit le doigt vers l’arme.

- Tu n’en as pas besoin.

Voilà. C’était dit. Elle lui tourna le dos sans rien ajouter d’autre, observant la porte de l’abri, cet abri où elle avait passé toute sa vie. Ainsi, c’était à cela que ça ressemblait, vu de dehors ? Normal que personne ne soit venu… Un pas après l’autre, lentement, concentrée sur les sons qui proviendraient de l’homme, elle s’avança. Démarche souple, elle connaissait le terrain désormais, et, si le sable crissait encore sous ses bottes, pas un caillou ne roula.

- Viens.

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Il crut bon de se redresser en même temps qu'elle, à la même vitesse, sans la quitter des yeux. Le couteau toujours en mains, sa méfiance s'abaissait pourtant de seconde en seconde, sans descendre toutefois en dessous d'un certain seuil que les entraînements et les expéditions militaires lui avaient appris à toujours conserver.

Son regard suivit alors le chemin fait par la main frêle de la femme, jusqu'à la bouche et la langue, qui commença alors un étonnant travail de nettoyage. Depuis le début de l'altercation, Connor avait l'impression d'avoir une chatte en face de lui, et ce ne fut pas ce regard emprunté de gourmandise qui allait le détromper.
Comme hypnotisé par ces yeux, il suivit le calme conseil de la femme, et laissa lentement son arme descendre vers le sol.

Elle se retourna alors, et commença à marcher vers l'abri. Il se dit que c'était sans doute sa dernière chance. Elle lui tournait le dos, il pouvait en profiter... Il le devait !
Et pourtant, ses jambes n'obéirent qu'à son instinct, qui lui disait pour le coup de la suivre, sans chercher le combat. Il verrait bien plus tard comment les choses évolueraient.
Ses yeux bleus se perdirent sur le bas de la silhouette, sur son déhanché souple et qui ne faisait que renforcer l'impression animale qu'elle dégageait.

" Ok... " put-elle entendre derrière elle. Ses oreilles perçurent également le bruit de l'acier qui pénétrait le fourreau et enfin, ceux de pas qui se dirigeaient vers elle en suivant sa cadence.

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Il avait rangé son arme, elle continua donc d’avancer. Arrivée devant l’ouverture sombre, elle fit trois pas et s’arrêta, laissant tout loisir à ses pupilles de se dilater avant de continuer la descente. Elle ne prenait plus vraiment garde à l’homme qui la suivait. Le lieu ne comportait aucune source de lumière, le générateur avait lâché tout récemment. L’endroit est vaste, après un couloir où deux bras tendus sur le côté peuvent tout juste toucher les bords, ils arrivèrent à un puits de noirceur.

La lueur du jour, derrière eux, ne laissaient qu’à peine entrapercevoir des écrans éteints, une multitude de gadgets inutilisables. Ses pieds parcouraient l’endroit d’un geste sur, pas une hésitation dans sa démarche, soit à la façon d’une aveugle connaissant son logis, soit, chose improbable, comme si elle voyait presque clair ici. Elle en oublia presque qu’il la suivait, ce n’est qu’en ouvrant un placard contenant encore bien des réserves d’eau et de nourriture qu’elle se rappela pourquoi elle était de retour.

- Par ici.

Elle l’écouta évoluer dans la pénombre, ouvrit une bonbonne d’eau et une boite de conserves, corned beef, visiblement, à l’odeur, puis se décida. Dans le même placard, elle prit une lampe et l’alluma. Volontairement ou non, elle braqua le faisceau vers son visiteur. Cela ne dura qu'un court instant avant qu'elle ne s'aperçoive de sa bourde et le dirige vers le sol... Sol où trainaient, çà et là, des ossements, parmi diverses tâches marrons.

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C'était un couloir on ne pouvait plus banal qu'ils traversaient. Connor ne prêtait pas tellement attention aux murs ni au sol. Son esprit était tout dirigé vers la nourriture dont ils approchaient à chaque pas. Bientôt, il pourrait manger, enfin. Ses papilles s'excitaient rien qu'à cette pensée. Elles allaient connaître l'extase.

De toute façon, la lumière du jour déclinant en profondeur dans le tunnel, ils n'y virent bientôt plus grand-chose, et le militaire accéléra le pas pour se placer juste derrière l'inconnue, histoire de ne pas la perdre. Imaginons qu'elle veuille le semer pour lui tendre ensuite une embuscade...

Ses yeux s'étant un minimum adaptés à l'obscurité, il comprit qu'ils arrivaient dans une pièce de grande taille. Il crut déceler des appareils électroniques mais là encore, ne chercha pas plus loin. Elle s'arrêta. Connor la vit diriger la main vers une armoire. Prudent, il passa la sienne sur le manche de son couteau.
Elle ouvrit la porte et l'appela. Circonspect, le punk s'approcha et quand il fut assez près, ouvrit en grand les yeux :

" Putain ! " fit-il d'un étonnement coupé, soufflé, par ce qu'il avait en face de lui. Des boîtes de conserve ! Il allait faire un festin !
Il lâcha le manche de sa lame et s'empara de l'eau et de la nourriture en poussant un rire joyeux.
Pas un merci, il voulait manger d'abord !

Affamé et assoiffé, l'homme ouvrit la bonbonne d'eau et s'en laissa couler dans le gosier à ras-bord, et cela déborda sur son t-shirt brun. Il ouvrit la boîte de converse, et y plongea les doigts avant de pousser des petits gémissements satisfaits, comme si c'était un festin.
Soudain, il poussa un grognement, et étrécit les yeux en passant une main souillée devant eux.

Elle lui éclairait le visage et cela ranima sa méfiance. La femme comprit pourtant vite sa bévue et la rabaissa vers le sol. Le regard de Connor suivit le faisceau, et ce qu'il découvrit le scia un moment :

" Hé mais, c'est quoi qu'il s'est passé là ? On dirai un putain de massacre ! " s'exclama t-il en levant les yeux vers le regard sombre de sa bienfaitrice d'un jour. Pourtant, on aurait plus dit un enfant étonné que terrifié. Sans doute que lui aussi avant connu son lot d'horreurs...

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Elle le regardait se bâfrer, léger sourire aux lèvres. L’impression de se voir quand elle avait faim. Non, quand même pas… parce que lui bouffait comme un porc en fait. Avant de lui répondre, elle prit de l’eau en bouteille pour rincer ses bras et son visage, ôter le sang qui s’y trouvait. Séché, cela avait le don de devenir désagréable.

- Mange et bois doucement, tu risque d’être malade.

Le ton était informatif, pas qu’elle s’inquiétait de l’état éventuel de son invité, non, mais il fallait le dire puisque c’était le cas. Bref, le message avait été délivré, elle pouvait désormais s’intéresser à sa question.

- Ça…

Elle sourit à nouveau, un sourire de jeune femme heureuse, un sourire tout à fait franc, avec de la gourmandise plein les mirettes.

- Ça…

Répéta-t-elle en poussant du pied une manche d’uniforme militaire qui couvrait un os parfaitement propre…

- Ça, c’est que j’avais faim.

La réponse fut donnée tout naturellement, au passé, bien sûr, puisqu’elle avait fini le dernier il y avait peu. Elle avait le ventre plein, mais s’ennuyait fort, seule. Un temps ça allait, surtout quand ils étaient encore en train de supplier ou capable, à force d’effort, de la satisfaire… Marrant d’ailleurs la rage qu’ils y mettaient alors qu’ils étaient terrifiés.

- C’est pas un massacre, ça s’est fait petit à petit.

Ben ouais, tiens, c’est tellement évident.

- J'suis désolée, mais il n'y en a plus.

Et elle l'avait vraiment l'air de l'être, désolée.

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Il avait haussé imperceptiblement les épaules en réaction à son conseil, sans apparemment freiner ses ardeurs gloutonnes. Ses doigts plongeaient dans la boîte et en ressortaient pleins de miettes et de morceaux de viande qui disparaissaient bientôt dans sa bouche grande ouverte. Un Gargantua en puissance que voilà !

Pourtant, il arrêta bientôt de manger. Elle avait en effet commencé à répondre à ses interrogations, et cela provoqua chez lui, au début, une certaine stupeur. Il releva ses yeux bleus vers elle, et constata qu'elle s'était nettoyée. Elle était plutôt jolie, sans tout ce sang séché pour lui recouvrir la peau. Lui aussi se nettoierait bientôt... Il ne devait pas être beau à voir, avec la poussière et les petites blessures qui avaient recouvert ses traits.

Les "ça" se succédaient les uns après les autres tandis qu'elle lui désignait les restes de chair ou de tissu, qui avaient appartenu à d'autres hommes.

" Que... Quoi ? " dit-il en fronçant les sourcils, même si ses yeux s'étaient écarquillés pendant un bref instant. Il posa la boîte de conserve sur le côté, et se redressa lentement. Il commençait à s'interroger sur la santé mentale de son hôte, et espérait ne pas être tombé dans un traquenard. L'homme poussa un grognement, et se mordit les lèvres, l'air pensif :

" Alors, tu les as tous bouffé hein ? C'est toi qu'a fait tout ça... Hé bé... " commenta t-il à voix basse, les yeux tournés vers le sol en regardant les restes. Il se gratta l'arrière du crâne, détachant du même coup le bandana qu'il posa sur une table.
Connor releva enfin les yeux vers la femme, et ne put retenir un léger sourire en constatant son air désolé :

" Ouais nan, t'inquiètes pas. Je préfère le corned-beef ! " Ce qui supposait qu'il avait déjà goûté la chair humaine.
C'était effectivement le cas, mais c'est qu'il n'avait plus eu le choix, comme de nombreuses personnes. S'il pouvait, il évitait. Ce n'était pas qu'elle fût cannibale qui inquiétait Connor, mais qu'elle seule les avait tous tués, alors qu'elle aurait pu ne pas les dévorer et manger autre chose. Bref, il se devait d'être prudent, et de garder son couteau à portée de main...

Sa main d'ailleurs, il la tendit vers la femme. Il était préférable de faire ami-ami autant que faire se peut :
" J'suis Connor, et toi ? "

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Elle était contente d’avoir quelqu’un à qui parler, elle s’ennuyait dernièrement, les discours de ses gardes manger étaient d’un chiant ! « Non, pas moi, s’il te plait… » Mais est-ce qu’ils avaient écouté ses suppliques lorsqu’ils s’étaient servis d’elle ? Non. Alors elle fut sans pitié. Et puis, elle avait faim.

- Oui, j’avais faim, ils étaient là, inutiles. On ne recevait plus d’appels, on n’avait plus de stock de viande, alors je me suis servie, mais un par un, pour ne pas gaspiller.

L’explication fit son effet, l’homme paraissait ahuri et s’il lui était resté des réserves, il n’y aurait pas touché. Bonne nouvelle. Il ne s’agissait donc pas d’un pique assiette. Elle se détendit.

Il lui tendit alors la main, certes essuyée brièvement, mais encore couverte de viande. Elle y vit comme une offrande, un partage. Alors elle saisit la main, le poignet, en fait, et lécha un doigt, enlevant la viande qui y trônait. Puis deux, s’il la laissait faire. Et ainsi de suite jusqu’à ce qu’il retire sa main.

Elle goûta la saveur du dehors, de la crasse, chose qu’elle ignorait, de la terre mêlée à la viande, ses papilles en éveil, étonnée d’autant de goûts simplement sur des doigts. En même temps qu’elle dégustait, elle prit un peu de viande du bout des siens, respectant ce qu’elle prenait pour un rituel et les tendit, ainsi, à Connor.

- Moi c’est Nouanda.

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" Ha ouais, je vois, je vois... " marmonna t-il en hochant doucement la tête. Autant ne pas énerver la jeune femme. Elle n'avait pas l'air de lui être hostile, pour le moment. Par contre, il comptait bien faire attention à ses moindres gestes. Lui tendre la main, par exemple, eut un effet qu'il n'avait certes pas prévu.

" Que... " marmonna t-il d'une voix étouffée, sur le point de retirer sa main. L'impulsion naquit dans son bras, mais n'alla pas jusqu'au bout... car elle se contentait de lui lécher les doigts. Il s'était pendant un bref instant vu les doigts arrachés par les dents voraces et tranchantes de son interlocutrice.

Amusé et apaisé par ce geste qui n'avait rien de désagréable, l'homme esquissa un large sourire qui découvrit ses propres dents, et la laissa terminer son petit rituel. Visiblement, elle recelait de nombreuses surprises. Quelques pensées un peu plus vulgaires lui vinrent aussi, mais autant les laisser de côté...

" Content d'te rencontrer alors, Nouanda. Sans toi, j'serais en train de crever de faim..." dit-il en grimaçant, avant de saisir la base de la main de la femme, et de la porter à sa propre bouche. Après tout, c'est ce qu'elle voulait, et cela ne le dérangeait pas vraiment. Au contraire, il aimait bien ce petit jeu.

Il lécha alors les doigts, ceux-ci bien plus fins et délicats que les siens, et rien que ce geste fit naître une forte excitation en lui. Il fallait dire que la dernière fois qu'il avait vu une femme plutôt jolie, cela remontait à loin... Mais il restait méfiant.
Connor laissa ensuite retomber la main, et sortit une petite plaisanterie pour rafraîchir l'air :

" T'as des manières particulières de boire aussi ? " demanda t-il en souriant et en lâchant un petit rire.

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C’était plutôt agréable comme rituel, si si, autant de goûter ainsi que de faire goûter, finalement et l’échange lui arracha un sourire. Elle termina donc cet amuse bouche, un peu émoustillée, amusée également, s’interrogeant sur les autres rituels que respectait la tribu de ce visiteur.

"Aussi" ? Comment ça "aussi" ? Elle le regarda sans comprendre, la question la prit de court. N’était-ce pas ses manières à lui ? Elle fronça les sourcils, sans le lâcher des yeux, puis rit doucement.

- Lorsque je bois, je ne fais pas comme toi, non. Je n’en mets pas partout. Chez les gens civilisés – le ton était celui de la récitation – les gens se saluent en se serrant la main. Les repas sont pris avec des couverts et l’eau est bue dans un verre.
Je comprends mieux pourquoi tu manges ainsi à ta façon de dire bonjour…

Elle le détailla, de la tête aux pieds, tendit même la main libérée pour effleurer ce qu’elle regardait, commençant à la taille, remontant jusqu’aux cheveux. La coiffure l’intriguait. Le regard arrêté sur sa crête, elle demanda encore.

- C’était une récompense ou une punition ?

C’est qu’elle avait appris plein de choses sur les peuplades, hé, vraiment plein de choses… Et que les coutumes du morfal de service lui étaient totalement inconnues. Et ça, ça n’était pas normal.

Messages : 573 Date d'inscription : 16/08/2011

Le nomade écarquilla les yeux en grand après avoir eu le droit à une leçon de morale de la part de cette... tueuse psychopathe ! Décidément, le monde avait bien bizarrement tourné. Mais ces paroles associées à la moue à moitié désapprobatrice qu'elle afficha tirèrent chez lui un soudain rire et une mimique amusée plutôt qu'un accroissement de sa méfiance :

" Et ouais, j'suis sale ! Mais tu devrais voir dehors... Tout le monde est devenu comme ça. Pis c'est sympa non, de se lécher les doigts ? "

Il eut un petit clin d'oeil pour conclure ses paroles, puis la laissa parcourir son corps de la taille jusqu'à sa crête. Des yeux, l'homme suivit également cette main qui transmettait un peu de sa chaleur tout le long de sa promenade. Un moment agréable, là encore. A croire que la femme pouvait être un monstre de cruauté comme un monstre de douceur.

" Bah, c'est moi qui m'suis fait ça. C'est pour donner un style tu vois. " répondit-il un peu dubitativement avec un haussement d'épaules.
" On t'a punie toi ? " avança le militaire un peu subrepticement pour en connaître plus sur son hôte.

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Vrai qu’il était sale. Et oui, c’était sympa de se lécher les doigts, voire de lécher ceux des autres. Elle acquiesça, récupérant sa main qui s’était attardée non loin de l’épaule du crêteux, puis ajouta :

- Il n’y a plus de courant, tu ne pourras pas te laver ici. C’est bête, avant que ça coupe, la jauge indiquait encore bien des litres.

Un style ? Elle fronça les sourcils, était-ce quelque chose comme les peintures de guerre, une façon de montrer qu’il était un homme ? Qu’avait-il fait pour mériter cette marque… Quoique non, il disait l’avoir fait seul. Sa question la fit se raidir, elle le fixa dans les yeux, l’air sombre.

- On m’a punie, oui. Souvent. Longtemps. Si je n’obéissais pas. Si je faisais une erreur, si je n’acceptais pas. Mais c’est fini, ça. Je décide.

Un reflet de haine dans le regard, pure, simple, de la haine à l’état naturel. Elle émit un grognement sourd avant de se calmer, lentement.

- Je décide.

Elle pointa des os disséminés dans la salle du faisceau de sa lampe.

- Et puis, ils ne peuvent plus me faire grand-chose.

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Il n'avait pas dit qu'il comptait se nettoyer, mais l'idée qu'elle lui soufflait ainsi fut considérée comme plutôt bonne. L'homme haussa les épaules, puis lui montra l'armoire remplie d'encore plusieurs bonbonnes d'eau :
" Pas grave, j'irai dans un coin pénard et je me nettoierai avec ça. Y a trop d'eau pour qu'on emporte tout avec nous si on bouge, de toute façon. " argumenta t-il ainsi sa proposition.

L'ex-militaire pencha un peu la tête en la voyant froncer les sourcils à sa question, puis l'écouta attentivement en hochant doucement la tête. Cela expliquait bien des choses... Ce massacre surtout... Cela montrait au moins qu'elle ne l'avait pas commis sans aucune raison. Connor se trouva un peu plus rassuré par cette nouvelle, si bien qu'il ne sembla pas perturbé par l'éclat de haine qu'il lut dans les yeux de sa camarade. Plutôt, il lui posa une main solidaire sur l'épaule, pressant doucement celle-ci :

" Ouais, tu décides. L'important, c'est d'être libre, dans la vie. "
Quelle banalité... Mais il n'avait pas su trop quoi répondre. L'homme jeta un coup d'oeil à terre, et grimaça à la vue nouvelles des os :
" Bon, j'vais aller me laver moi. Vu que je suis sale apparemment. " annonça t-il d'un ton bourru, un sourire malicieux sur le visage.

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Elle posa les yeux sur la main qui lui pressait l’épaule, pour une fois qu’on ne la saisissait pas violemment, avec ou sans intention de lui nuire, elle appréciait. Quoique. Elle contemplait la main avec un regard absent, se demandant ce qu’elle fichait là. La main, pas Nouanda.

- Je décide, oui. Et je suis libre, la porte est ouverte.

Voilà, simple réponse, logique. Un instant elle songea que la viande était meilleure lorsque la peau était lavée, quoique… Le goût qu’elle avait dégusté sur les doigts était plein de saveurs nouvelles, cela changerait sans doute de la viande qui ne suintait que la peur, dernièrement, malgré la peau propre.
Sauf qu’elle n’avait pas faim, donc l’idée ne prit place en sa tête qu’un fugace instant, repartant aussi vite qu’elle était venue.

- Je vais te donner de quoi frotter, s’il n’y a plus d’eau en haut, mieux vaut économiser. Suis-moi.

Elle prit une bonbonne neuve et se dirigea vers un placard, se saisit de torchons et – luxe dans le fract – d’une serviette éponge. Le tout, propre, immaculé, blanc. Lorsqu’ils arrivèrent dans ce qui ressemblait à une douche à jet puissant, elle lui dit, le plus naturellement du monde.

- Fais pas gaffe au désordre.

Formule énoncée automatiquement, plutôt de circonstance. C’est que les murs étaient couverts de taches, des taches bien sombres.

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La porte est ouverte... Oui, c'était vrai. Et si cela se passait mal, il serait bon que la porte restât ouverte. L'homme retira bientôt sa main, satisfait de voir en tout cas qu'elle n'avait pas repoussé ce geste. Ainsi, il avait quelque chance d'échapper à une soudaine crise de changement d'humeur. De plus, l'ex-militaire commençait à bien accrocher à cette drôle de jeune femme. Et ça lui faisait du bien de parler, à lui aussi.

" Ok, merci." dit-il en réponse à sa proposition. En voyant les serviettes propres, il se rendit compte de sa chance. Car il allait même pouvoir frotter sa crasse. Bientôt, ses batteries seraient toutes rechargées à fond pour une nouvelle galère dans le désert !
L'homme la suivit donc dans le couloir, et s'arrêta sur le seuil des douches collectives. Il posa de nouveau sa main sur l'épaule de Nouanda :

" T'inquiètes, ça ira. Merci. " dit-il avec chaleur. Puis il prit les serviettes, les posa à terre à côté de là où il comptait se doucher, prit la bonbonne, puis commença à se déshabiller en regardant les tâches sombres : après les os dispersés au sol, elles l'étonnaient à peine. Engoncé dans ses pensées, le punk ne se rendit pas compte de la présence persistante de Nouanda : il était si pressé de se laver ! Il retira la majorité de ses vêtements, ne se trouvant bientôt plus qu'en caleçon. Se retournant à demi, l'homme aperçut alors Nouanda toujours présente.
Il ne savait pas trop quoi dire, et préféra jouer de l'humour. Souriant de toutes ses dents, il demanda avec curiosité :

" Quoi ? Tu veux te doucher aussi pour nettoyer le sang ? "

Après tout, elle avait eu beau lécher les traces de sang séché, tout n'était pas parti comme ça.

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Bah ouais, elle matait, Nouanda, ses yeux ne quittaient pas le corps de l'homme dénudé des yeux. Pas par curiosité, vraiment, elle savait comment était fait un homme, mais plus pour discerner les différences entre lui même et ceux qu'elle avait connus. Des militaires pour la plupart. La peau tannée par le soleil était étrange, la couleur, en fait, avec quelques marques plus claires... Elle s'interrogea sur ces teintes différentes, se demandant lesquelles étaient la couleur réelle de l'épiderme de Connor.

Quand il émit l'idée qu'elle se lave également, elle hocha la tête, cela faisait une journée qu'elle ne l'avait pas fait et d'ordinaire elle se lavait deux fois par jour. Au matin pour se laver des souillures de la nuit, et le soir pour ôter les traces des entrainements. Soit.

- Bonne idée.

Et elle se désapa. Ses gestes étaient précis, elle délaça ses rangers, les envoya près de la porte et déboutonna son jean. Rien d'érotique dans sa façon de faire. Hop, descendu aux chevilles, culotte dans le plus pur style "petit bateau" qui rejoint le tas, elle s'en extrait, balança le tout sur ses pompes. Chaussettes idem.
Quand la blouse fut ouverte, sa poitrine que rien ne soutenait darda. Elle défit sa tresse et envoya son dernier vêtement plus si blanc qu'il devrait rejoindre ses fringues.

Elle passa alors devant lui, ouvrit la bonbonne et se saisit d'un savon posé dans un coin. Sans prendre plus garde à lui que cela, elle mouilla le bloc nettoyant et son corps, puis commença à frotter. Toujours ces gestes précis, allant droit à l'essentiel. Il fallait se décrasser et elle avait peu d'eau. Alors elle frottait.

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Effectivement, la peau de l'homme était le reflet de sa vie passée à l'extérieur depuis un bon bout de temps. Tannée par le soleil par endroits, elle était plus claire à d'autres, ou encore plus assombrie, selon la dose de crasse et de poussière qui la recouvrait telle une seconde peau. Aucun tatouage pour égayer tout cela. Des muscles secs par contre, bien présents malgré la privation de nourriture; des restes d'une vie formée de sport et d'action. Quelques cicatrices parsemaient son corps, dont la plus importante trônait au niveau de son ventre. Cela aussi, c'était un reste de son ancienne vie.

Ses traits se figèrent quand elle lui répondit, puis un léger sourire entendu vint les étirer. En fait, il s'était même demandé à un moment si elle avait déjà vu un corps de mâle, ce qu'il pensait maintenant probable puisqu'elle n'avait pas l'air gênée le moins du monde. Au contraire même ! Connor pensa cyniquement que le traitement qu'elle avait reçu en ces lieux n'avait pas eu que des mauvais côtés...

Il resta dans cette position tandis qu'elle se déshabillait. Rien de bien sexy, ce n'était pas un strip-tease bien sûr, mais il n'en fut pas moins fortement excité. Son corps aux formes bien faites, désirables et propres se dévoilait petit à petit. Un brusque frisson le saisit qui se mua en petit soupir quand elle découvrit ses seins dardés et son intimité...
Elle s'approcha alors de lui, et l'excitation monta encore plus. Il n'y avait pas qu'elle d'ailleurs... Ou du moins, cela se traduisait chez une certaine partie de son corps... Bientôt, le caleçon fut visiblement difforme. Elle était là, à peine à deux mètres de lui...

Lui par contre, ne savait plus quoi dire. Plus quoi faire non plus. Il restait interdit, la regardant, longtemps, se frotter. De plus, Connor appréhendait la réaction de la femme si elle constatait son érection, d'où son hésitation à retirer son caleçon. L'homme se retourna à demi, mais c'était sans doute trop tard...

Elle avait bien dû remarquer cette bosse, et cet air assoiffé, et cette hésitation !

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Elle avait bien vu la bosse. Certes. Et... bon, ça ne la dérangeait pas plus que ça, elle en avait vu d'autres, comme dirait l'autre. Ok, ça la laissait pas totalement indifférente, mais là, pour l'heure, c'était le nettoyage. C'était pour cela qu'ils étaient là, non ? Donc elle lui tournait le dos, à cet instant, occupée à frotter ses jambes.

- T'attends quoi ?

Demanda-t-elle en se redressant pour se retourner vers lui, toujours couverte de savon. Puisqu'il n'avait pas bougé - elle se savonnait réellement rapidement - elle entreprit de l'humidifier et de le frotter... Encore une fois, les gestes n'avaient rien d'érotiques, elle le lavait comme on aurait lavé un enfant, un peu plus forts, les gestes, sans doute.

- Tu laves pas partout ?

L'oeil, les yeux en fait, étaient posés sur le caleçon. Sur la bosse, même.

- J'vais pas te manger, hein, j'ai plus faim...

Sûr que s'il restait planqué, c'est qu'il avait peur... Elle ne voyait que ça.

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" Ouais nan... C'est juste que ça fait longtemps que j'ai pas vu une femme comme toi... " dit-il d'une voix rauque sans pourtant faire dans le sentimentalisme. Il énonçait une vérité, c'était tout. Il la regardait, penchée, de dos, lui dévoilant son bel arrière-train recouvert de mousse, et il s'humidifiait les lèvres, mis en appétit.

Elle entreprit ensuite de le savonner, le frottant énergiquement. Ce n'étaient pas des caresses lentes et sensuelles, mais elles étaient agréables rien que parce qu'elles existaient. Connor, surpris dans un premier temps, prit bien vite ses aises dans ce nettoyage chaleureux, et il afficha un sourire large. Ses propres mains se posèrent finalement sur le corps de la femme : d'abord les épaules, les flancs et enfin les seins, qu'il entreprit de frotter : il se prêtait au jeu.

" T'inquiètes, ça va mieux... " dit-il doucement pour répondre à sa dernière interrogation. La deuxième elle, ne trouva comme réponse qu'un seul geste. D'une pression de la main, il fit tomber le caleçon à ses pieds, révélant un sexe plutôt durci et tendu qui tremblota légèrement sous ce brusque geste. Le caleçon tomba sur le sol en même temps que l'eau noire de crasse qui s'écoulait de lui.